Une tendance attractive mais ambivalente
Sur TikTok et Instagram, les vidéos fleurissent : séances de Pilates dans un décor immaculé, smoothie vert en mains, tenues coordonnées, accessoires de luxe. Cette esthétique vise à mêler style, santé et discipline. Pourtant, comme le souligne Boukhobza, “l’idée n’est pas de remettre en question le Pilates”, mais bien “que l’image prenne parfois le pas sur la pratique”.
Le modèle proposé n’est pas seulement celui d’une activité physique, mais d’un corps — et d’un esprit — idéalisé : minceur valorisée, contrôle visible, sérénité affichée. Pour une adolescente en quête de repères, c’est à la fois une invitation inspirante… et un piège potentiel.
Les dangers invisibles derrière le filtre parfait
Quand l’exercice devient avant tout une performance visuelle, le bien‑être peut vite se transformer en injonction. Boukhobza alerte : “Le bien‑être à tout prix, qui devient décor, performance, injonction.” Les effets ? Une auto‑critique renforcée, un sentiment d’insuffisance ou l’impression que “prendre soin de soi” rime d’abord avec “être parfait(e)”. Chez certains adolescents, ce glissement peut fragiliser l’estime de soi, favoriser l’anxiété ou alimenter une comparaison permanente.
Cette tendance, très visuelle, s’appuie sur un fameux mix : sport populaire (Pilates) + esthétique glamour + validation numérique (likes, vues). Quand tout semble fluide à l’écran, on oublie les doutes, la fatigue, les jours sans — or ce sont eux qui sont la réalité.
Comment en parler avec son ado sans dramatiser
Pour les parents, le questionnement est utile mais sans jugement : il ne s’agit pas de diaboliser le Pilates ou la mode rose, mais de replacer le bien‑être dans une logique vraie. Quelques pistes :
Valoriser les moments de pause, de désordre, de relâchement : “Le vrai bien‑être n’a rien de photogénique”, rappelle Boukhobza.
Encourager l’ado à sortir de l’écran : qu’il (ou elle) vive l’activité pour ce qu’elle apporte au corps et à l’esprit, et non pour la photo ou le filtre.
Questionner ensemble le “pourquoi” derrière une séance : est‑ce pour bouger, pour se sentir bien… ou pour “être vue” comme belle, calme, parfaite ?
Mettre en avant les autres formes de soin de soi : créer, rire, ne rien faire… toutes aussi légitimes que le “look sportif”.
Le mot de la fin
La tendance Pilates Princess peut être une porte d’entrée ludique pour bouger ou se recentrer. Mais quand l’idée centrale devient d’« être une princesse Pilates » plutôt que de vivre pleinement l’activité, l’équilibre se rompt. En tant qu’adulte ou parent, notre rôle n’est pas de contrôler le feed Instagram d’un adolescent, mais de l’aider à raconter sa propre histoire : celle d’un corps vécu, aimé, respecté — avec ses hauts, ses bas, ses zones de confort et ses zones de croissance.
Alors que les filtres s’effacent et que les séances se pause‑réelle, n’oublions pas : le plus beau projet est celui de rester fidèle à soi‑même.